En ce quatrième Dimanche du Temps Ordinaire (per annum), la liturgie eucharistique nous propose la grande fresque des Béatitudes. A première lecture, elles nous apparaissent impossibles, paradoxales, exagérées, un programme pour des hommes et des femmes exceptionnels et des vocations spéciales. Et, au contraire, elles ont été écrites pour nous, qui nous débattons chaque jour dans notre médiocrité et notre faiblesse. De plus, les Béatitudes sont une offre de bonheur pour tous. Mais il est vrai qu’elles exigent le passage à un autre mode de pensée et de vivre; elles supposent, en fait, qu’on entre dans un monde valeurs nouvelles; des valeurs qui remettent en question les vieilles valeurs, considérées comme absolues. Nous voudrions offrir ici à nos lecteurs sept clefs pour entrer dans cette véritable et effective Grande Charte (Magna Charta) du christianisme.
La clef christologique. On lit dans le Catéchisme de l’Eglise Catholique : “ Les béatitudes dépeignent le visage de Jésus-Christ et en décrivent la charité » (CEC 1717). Dans les Béatitudes, nous est donc décrit avant tout le visage du Christ et tracé, en même temps, son itinéraire historique, de la naissance à la mort et jusqu’à la résurrection. Un parcours à l’enseigne d’une charité sans préventions et totale.
La clef théologique. Il est évident que les Béatitudes nous parlent de Dieu, de la logique du Royaume que Jésus a inauguré dans la réalité du monde.
La clef théologique et sotériologique. Les Béatitudes sont le chef-d’œuvre de l’Esprit Saint dans le cœur et dans la vie des disciples du Christ. Si elles sont vécues en Jésus d’une manière parfaite, elles resplendissent dans les disciples, peut-on dire, d’une manière différenciée. Ce n’est pas par hasard si l’Eglise vénère diverses catégories de saints, des apôtres aux confesseurs, dans la personnalité de qui les Béatitudes expriment un reflet divers.
La clef ecclésiologique. S’il est vrai que les Béatitudes tracent le profil du disciple de l’Evangile, on y reconnaît aussi le visage de la Communauté chrétienne, sans cesse appelée à se confronter à cette page d’Evangile pour croître en authenticité et en plénitude.
La clef eschatologique. Les Béatitudes s’accomplissent dans l’eschatologie (aux derniers temps). Ce qui nous fait comprendre comment l’Eglise avance dans l’histoire entre le « déjà là » et le « pas encore ». Le chrétien ne fuit pas la réalité du temps présent et par conséquent, le devoir de construire l’histoire, mais il le fait toujours en lien avec sa fin ultime qui donne valeur et sens.
La clef morale. Mario Rollando a écrit que les Béatitudes ne sont pas des conditions éthiques pour entrer dans le Royaume, mais l’épiphanie de l’existence éthique de ceux qui appartiennent déjà au Royaume. Le chrétien « fait » à partir de ce qu’il « est » en Christ.
En conclusion, il y a un défi à relever : la joie. Si nous passons à côté de cette connotation, on peut parler d’une proposition d’idéaux très élevés, mais certainement pas de béatitudes. Une joie qui a Dieu pour fondement, Lui dont les promesses sont inébranlables et victorieuses, en dépit des crises que traverse notre histoire.

Commentary by b. Sandro Carotta, osb
Abbazia di Santa Maria – Praglia (Italy)

Traduction de f. Christophe Vuillaume, Monastère Masina Maria – Mahitsy (Madagascar)