L’apôtre Paul cherche à réorienter notre vie pour qu’elle ne perde pas son sens ultime qui en est le plus authentique : “Recherchez les réalités d’En Haut, non pas celle de la terre”. Il ne s’agit pas d’une fuite de la réalité à travers une mystification du réel, mais bien de la capacité de donner à toute chose son juste poids pour se soustraire à la considération cynique du Qohélet selon qui la vanité normale et acceptable des choses risque d’être pétrie de « souffrances » et de « tourments ». L’évidence avec laquelle le Qohélet affirme que chacun devra laisser sa part à un autre rend encore plus admirable la façon dont le Seigneur se soustrait à la demande de se faire l’arbitre en matière d’héritage entre deux frères. Le Seigneur ne refuse pas le devoir et le souci de la justice, mais Il veille à ouvrir nos yeux sur l’essentiel de la vie, car nous risquons facilement de perdre de vue l’horizon qui est celui de notre existence : alors qu’on construit des greniers toujours plus grands, la vie, qui assume le sens de la relation et du partage, risque de se rapetisser. Le soliloque du personnage de la parabole résonne ainsi : “Je vais démolir mes greniers et j’en construirai de plus grands et j’y entasserai tout mon blé et tout ce que je possède” (12, 18). Le soliloque de Qohélet semble vouloir gloser les propos de ce riche propriétaire en y ajoutant cet explosif : “Cela aussi est vanité” (Qo 2, 23). De son côté, l’apôtre nous met en garde contre le risque de nous cacher ici sur terre, alors que nous sommes appelés à partager le don et la responsabilité de l’habiter d’une façon consciente et solidaire : « Recherchez les choses d’En Haut » (Col 3, 2).

Commentaire de f. Michael David, osb Abbaye de Novalesa

Traduction de f. Christophe Vuillaume, Monastère Masina Maria – Mahitsy (Madagascar)